Les violences envers les femmes et les minorités de genre prennent de nos jours différentes formes à travers les messages privés, les mails et les photos, en raison de l’explosion des réseaux sociaux. Bien que souvent minimisées, les agressions en ligne ont des conséquences dévastatrices et causent des traumatismes importants chez les victimes. L’urgence est donc aux solutions. J’étais l’invitée de la conférence internationale sur les cyberviolences organisée par #StopFisha à Paris.

Conférence Paris

En faire une priorité

Dans un discours lu devant des milliers de déléguées au siège de l’ONU à New York pour la Commission sur la condition de la femme (CSW), António Guterres, Secrétaire général des Nation Unies, a souligné que :

La violence en meute et en ligne est une attaque directe contre la démocratie qui censure de fait les femmes, les harcèle et émousse l’ambition des filles à devenir des dirigeantes.

Des dirigeantes, mais surtout aussi des femmes fortes qui osent en parler. C’est dans ce cadre que l’association #StopFisha a organisé en avril 2023, à Science Po Paris, une conférence qui a eu pour but de faire un état des lieux du cybersexisme dans différents pays. A mes côtés et pour en parler, des activistes, des représentants de l’UNESCO, des parlementaires nationaux et européens, ainsi que la Ministre Française pour l’égalité des genres. Une occasion de proposer des solutions, mais surtout aussi de croiser les regards.

Des femmes et minorités de genre prises pour cible

Bien que la cyberviolence touche potentiellement toute la société, les femmes sont largement surreprésentée chez les victimes. Les actes de violence, bien qu’ils ne soient pas toujours répétés ou prolongés dans le temps, ont pour unique but de nuire à l’individu. De plus, la culpabilité est souvent ressentie par les victimes, avec près de 2 victimes sur 10 convaincues qu’elles méritaient leur sort.

Les conséquences de ces violences sur le quotidien des femmes sont bien réelles, aussi bien dans leur vie personnelle que professionnelle. Les problèmes de santé physique et mentale peuvent être graves, allant de l’insomnie à la dépression en passant par les maladies cardiaques. Selon l’ONU, en 2015, 73 % des femmes dans le monde étaient exposées à des violences en ligne. Avec la pandémie de Covid-19, ce chiffre serait passé à 85 % en 2021, selon une étude de The Economist Intelligence Unit.

Un problème systémique

Les femmes vivent des violences en ligne en raison de plusieurs systèmes d’oppression qui ont tendance à se renforcer : hypersexualisation, slutshaming, non respect du consentement, body shaming, etc. En Belgique, améliorer la protection des victimes nécessite une large majorité dans le Parlement, notamment parce qu’il s’agit de toucher à la Constitution belge. La liberté d’expression étant défendue comme absolue par les partis de droite et réactionnaires, au détriment de la sécurité d’expression, les cyberharceleurs sont très peu poursuivis. En outre, la difficulté à collaborer avec les plateformes pour lever l’anonymat sur Internet complexifie également l’efficacité du système juridique.

Penser que les attaques se limitent à l’espace virtuel est une illusion. En effet, plus de 7 victimes sur 10 signalent que les violences en ligne se poursuivent dans leur vie personnelle, tandis que près d’1 victime sur 5 associe ces violences à des expériences de violence physique ou sexuelle.

Faire entendre sa voix

La cyberviolence touche de plus en plus de jeunes, comme en témoigne le nombre croissant d’histoires qui sont racontées chaque jour. Le risque pour la société dans son ensemble est considérable. En parler ouvertement, c’est rendre visible ce fléau, combattre l’auto-censure dont les victimes sont souvent victimes, et nourrir l’espoir d’un changement.

À Paris par exemple, l’association Stop Fisha composée d’étudiantes, lycéennes, avocates ou encore salariées, traque ces comptes et les signalent.

« Dès qu’un contenu viole votre consentement, faites des captures d’écran et signalez-le immédiatement à la plate-forme. Ne culpabilisez pas, rappelez-vous que vous avez le droit d’envoyer un nude, c’est aux autres de respecter votre intimité. Vous pouvez porter plainte même si vous ne connaissez pas l’identité de la personne à l’origine du cyberharcèlement. Et vous pouvez vous rendre au commissariat sans la présence de vos parents, même si vous êtes mineurs »

Victoire Poignet, engagée dans le pôle accompagnement des victimes de Stop Fisha.

Sur le volet politique, les leviers sont nombreux. Une première étape serait d’ailleurs d’obtenir un rapport annuel sur l’ampleur et l’évolution des cyberviolences, comme c’est désormais le cas en France. Je souligne d’ailleurs, que j’ai formulé cette demande auprès du Gouvernement bruxellois, ainsi que bien d’autres, que vous pouvez retrouver ici.

Découvre mon discours partagé lors de la conférence

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