L’endométriose est une maladie encore très peu connue, et pourtant, elle concerne plus d’1 femme sur 10. En moyenne, il faut 7 ans pour obtenir un diagnostic. Dans l’intervalle, des douleurs et beaucoup de souffrance pour ces femmes et ces filles. Pour la toute première fois en Belgique, un plan de sensibilisation vient d’être voté au Parlement francophone bruxellois et un second vient d’être déposé à la Fédération Wallonie-Bruxelles. L’objectif : une plus grande sensibilisation et une meilleure prise en charge de la maladie. Un problème majeur de santé publique, qui nécessite d’être traité en profondeur, et un tout premier pas du côté politique sur la question.

Le projet pour la Fédération Wallonie-Bruxelles (voté à l’unanimité par le Parlement)

Le projet pour le Parlement francophone bruxellois (voté à l’unanimité par le Parlement)

« Pendant des siècles, on a estimé qu’il était normal que les femmes souffrent pendant leurs règles, ce qui explique le retard considérable que nous avons sur cette maladie. Pour ces potentielles 855 000 femmes qui seraient atteintes de la maladie en Belgique, il faut se rendre compte des difficultés professionnelles, des limitations en matière d’activité physique, de vie sociale, et des répercussions sur la fertilité dans beaucoup de cas. On est face à une question de santé publique et il s’agit de la sortir de l’ombre, et les écologistes ont à cœur de la mettre enfin à l’agenda politique et médiatique »

Les 2 plans déposés au Parlement francophone bruxellois et à la Fédération Wallonie-Bruxelles proposent diverses mesures, avec un volet important de sensibilisation. Il s’inspire directement du travail mené par le Gouvernement australien sur la question, faisant de ce pays un véritable précurseur. 

Tout d’abord, les mesures du plan visent à soutenir financièrement les associations et acteurs de terrain qui travaillent sur ces questions. Il s’agit de travailler à une sensibilisation à la maladie, par exemple, via l’éducation à la vie relationnelle et affective. Le deuxième volet concerne le fait d’outiller le personnel médical, notamment, grâce à des formations dans les plannings familiaux, en vue d’améliorer la prise en charge des patientes. Enfin, la recherche scientifique doit être soutenue pour pouvoir améliorer notre connaissance de la maladie. 

Qu’est-ce que l’endométriose ?

L’endométriose est une maladie “qui se caractérise par la présence de tissus semblables à celles de l’endomètre à l’extérieur de l’utérus provoquant des lésions et des kystes sur d’autres organes (ovaire, trompe de Fallope, vessie, intestin, etc. ou des adhérences entre organes”. Cette maladie peut affecter toutes les femmes, les filles, les transgenres, les non-binaires et les personnes dont le sexe féminin est assigné à la naissance, quelque soit leur âge, leurs antécédants ou leurs styles de vie. Les symptômes qu’elles présentent sont très variés : douleurs pelviennes, infertilité, douleurs lors des rapports sexuels, douleurs lors des règles, fatigue chronique, troubles digestifs et urinaires, etc.

Le diagnostic est un élément clé dans le traitement de la maladie, car plus il est posé tôt, plus il y a de chance que les traitements fonctionnent. Pourtant, le délai de diagnostic se situe aujourd’hui entre 7 et 10 ans, après l’apparition des premiers symptômes. 

Selon certains médecins, l’endométriose peut être diagnostiquée très rapidement en discutant avec la patiente de ses symptômes, des moments lors desquels la douleur survient et l’impact qu’ont les symptômes sur sa vie. La difficulté se trouve dans le fait qu’il n’y a pas toujours de lien entre l’étendue de la maladie et les symptômes de la patiente : une toute petite lésion peut être très douloureuse, tout comme une grande lésion peut l’être beaucoup moins. Outre l’examen des antécédents médicaux, l’endométriose peut être détectée suite à une échographie ou une imagerie par résonance magnétique (IRM).

Il n’existe pas de traitement curatif pour l’endométriose à l’heure actuelle, mais il existe des traitements pour ralentir la progression de la maladie et soulager les symptômes. Des solutions médicales sont proposées : les traitements hormonaux pour arrêter les règles artificiellement et la chirurgie pour enlever le tissu de l’endomètre qui se situe en dehors de l’utérus. Il existe également des solutions naturelles, comme la kiné, l’ostéopathie, la naturopathie, le rééquilibrage alimentaire, etc.

Les freins au diagnostic

Nous connaissons toutes et tous au moins une personne atteinte d’endométriose : une sœur, une cousine, une amie, une collègue, une voisine. Et pourtant, les femmes souffrent en moyenne 7 ans avant d’être diagnostiquées et prises en charge, il n’existe pas de traitement et les soins remboursés sont très rares. Ce manque de diagnostic s’explique entre autres par une idée reçue qui induit que les douleurs pendant les règles seraient “normales” et ne doivent donc pas être prises en considération comme les symptômes d’une pathologie. De cette croyance découle un manque d’intérêt scientifique et de financement dans la recherche sur la question, et à ce jour, il n’existe aucun fond de recherche sur l’endométriose à l’international et peu de ressources médicales sur lesquelles s’appuyer. A noter que ce manque de recherche concerne plus globalement la santé des femmes en général.

La différenciation dans la prise en compte des symptômes est un premier élément qui freine la prise en charge de la maladie. En effet, les violentes douleurs pelviennes lors des menstruations sont souvent considérées comme des douleurs “normales”, une des raisons pour lesquelles le diagnostic est posé si tardivement en ce qui concerne l’endométriose.

Bien souvent, l’intérêt porté aux maladies des femmes se limite à celles qui ont des répercussions sur leur fertilité. Un élément appuie cette hypothèse : aujourd’hui en Belgique, sur 4 interventions médicales spécifiques à l’endométriose remboursées, trois sont des PMA et une est un traitement qui peut soit empêcher la progression de l’endométriose, soit aider à la réussite d’une PMA. Ces éléments nous démontrent que le fait d’empêcher la progression de la maladie ou d’en finir avec les douleurs passe au second plan.

Répercussions de l’endométriose

Sur le plan de la société, malgré l’ampleur de la maladie, les jeunes filles, les femmes, les garçons et les hommes autour d’elles, n’y sont pas sensibilisés. A cause de ce manque d’information, les personnes concernées par l’endométriose ne connaissent que tardivement la source des douleurs menstruelles. On sait pourtant que plus le diagnostic est posé tôt, plus l’évolution de la maladie a des chances d’être contrôlée.

En plus de cela, les douleurs aiguës, la fatigue, la dépression, l’angoisse et l’infertilité qu’elle provoque entraînent une diminution de la qualité de vie des personnes touchées. La maladie a également des répercussions sur l’entourage, leurs familles, leurs partenaires. Les douleurs provoquées par l’endométriose peuvent pousser des personnes atteintes de la maladie à interrompre des rapports sexuels ou à les éviter, entrainant un impact sur la vie affective.

Sur le plan de la santé publique, 10 à 15% des femmes, soit presque 855.000 belges, seraient touchées par la maladie. Le grand public et de nombreux professionnels de la santé intervenant en première ligne ne connaissent pas la corrélation entre les douleurs pelviennes et la maladie, avec pour conséquence une normalisation et une stigmatisation des symptômes, mais aussi des retards considérables dans le diagnostic et le traitement de la maladie. En outre, on observe un manque d’équipes pluridisciplinaires possédant les compétences et équipements variés nécessaires à un diagnostic précoce et à un traitement effectif de l’endométriose. A noter qu’à Bruxelles, l’Hôpital Erasme a récemment lancé une Clinique de l’endométriose qui, justement, propose une approche transversale aux patientes

Sur le plan économique et professionnel, les personnes atteintes de la maladie sont parfois tellement prises de douleurs qu’elles ne peuvent pas travailler ou étudier : 15 % des personnes concernées disent devoir cesser leur activité au moins une fois par jour à cause des symptômes et plus de 30% doivent quitter précipitamment le travail, au moins une fois par mois. Le traitement de l’endométriose pourrait alors permettre de réduire l’absentéisme scolaire ou d’accroître la capacité d’une personne de faire partie de la population active.

Malgré ces éléments, peu de recherches sont faites sur l’endométriose. Pourtant, la recherche scientifique pourrait contribuer à trouver un traitement et des méthodes de diagnostic moins invasives. 


Mesures du plan :

  1. Soutenir les associations de terrain spécialisées sur la question de l’endométriose 
  2. Sensibiliser la population à l’endométriose, notamment via les centres de soins, les écoles, les plannings, les activités parascolaires, etc.
  3. Former et sensibiliser à l’endométriose les professionnels de la santé
  4. Inclure l’endométriose dans les missions de l’éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle (EVRAS) et soutenir les acteurs de terrain pour le faire
  5. Encourager la recherche scientifique sur l’endométriose
  6. Plaider pour que les cursus d’enseignement supérieur en santé intègrent systématiquement l’endométriose afin d’améliorer les compétences en matière de dépistage, de diagnostic, de prise en charge ou d’orientation des cas
  7. Initier une étude avec les autre niveaux de pouvoir compétents sur l’endométriose
  8. Aborder plus et mieux les questions de santé des femmes

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