Le secteur public emploie presque 1 personne sur 5 à Bruxelles. Ce sont des milliers d’emplois qui sont concernés et encore très stéréotypés dans leur répartition : beaucoup d’hommes techniciens ou directeurs, beaucoup de femmes aux postes administratifs. L’occasion pour le Parlement de proposer 19 recommandations, pour faire de l’emploi public un secteur exemplaire. L’emploi, comme levier d’émancipation pour les femmes, est un levier essentiel.

La Résolution du Parlement bruxellois visant à féminiser la fonction publique régionale. 

Comment faire de l’emploi du secteur public bruxellois, un emploi plus inclusif et diversifié ? Les 19 recommandations concernent notamment l’instauration d’un système de quotas visant une meilleure parité dans les jurys de recrutement, une lutte plus intensive contre les biais et stéréotypes dans la communication de l’administration lors des recrutements, mais aussi la mise en place d’un plan « diversité » au sein des administrations. Toutes ces recommandations ont été alimentées par des rencontres avec des expertes de la question, ainsi que des entreprises publiques bruxelloises.

Aujourd’hui, pour une partie des emplois publics, le système souffre de ce qu’on appelle la « gender blindness« , soit l’impression que l’égalité en emploi est acquise parce qu’il y a bien des femmes dans la fonction publique, mais il réside en réalité une absence des femmes à certains endroits.

De manière générale, l’emploi des femmes connaît un biais de genre sur au moins cinq aspects :

  • Les femmes sont exclues de certains secteurs ou de certains métiers ;
  • Les femmes occupent des emplois avec des contrats moins stables ;
  • Les femmes sont surreprésentées dans le travail à temps partiel ;
  • Les femmes sont moins nombreuses à occuper des postes à responsabilité ;
  • Les femmes sont surreprésentées dans les violences sexuelles et sexistes sur leur lieu de travail.

Selon le Syndicat libre, les femmes représentent par exemple seulement 28% de la police locale et 8% de la Police Fédérale. Par contre, dans l’enseignement, elles représentent 72% des forces vives, et 80% dans les hôpitaux. La sécurité est donc, par stéréotype, plutôt l’affaire des hommes, alors que le soin est plutôt l’affaire des femmes. Le travail manuel et technique, ou les métiers de sécurité qui comportent des risques sont majoritairement masculins.

Il y a un grand nombre de femmes dans nos institutions publiques, mais la stabilité et la qualité de leurs emplois varie. On sait par exemple qu’elles sont surreprésentées dans les temps partiels (36% de bruxelloises à temps partiel, contre 12% des hommes) et prennent davantage de pauses carrière. Autre disparité : actuellement, 65% des femmes sont recrutées sur une base contractuelle, et ne sont donc ni mandataires, ni statutaires (chiffres du SLFP). Dans la Défense, par exemple, à peine 9,4% sont des femmes, dont seules 2,8% sont des officiers. A noter qu’il existe également des inégalités de salaire, car même si dans les emplois publics, les salaires sont préétablis et non négociables, on constate que souvent les femmes et les hommes n’occupent pas les mêmes postes et n’ont pas les mêmes titres, et qu’à travail égal dans la pratique, le profil de fonction diffère parfois, et donc, la rémunération.

Enfin, à cause du plafond de plafond de verre, elles sont sous-représentées dans les fonctions les plus hautes, et notamment chez les cadres. A Bruxelles, 3 fonctions de direction sur 10 et 2 fonctions de manager sur 5 sont occupées par des femmes.

Parmi les éléments qui provoquent et accentuent ces disparités de manière structurelle, on retrouve : 

  • Les stéréotypes de genre qui pèsent sur certains métiers ou certains secteurs ;
  • Le harcèlement sexuel et sexiste dans l’environnement de travail, en particulier dans les secteurs qui comptent peu de femmes. Selon une étude (JUMP, 2016) belgo-française, 94 % d’entre elles rapportent avoir subi du sexisme dans un cadre professionnel ;
  • La charge du foyer qui continue à peser davantage sur les femmes et provoque des temps partiels, des congés parentaux et des pauses carrières ;
  • Enfin, très important, l’intersectionnalité :  c’est-à-dire les multiples facteurs tels que la nationalité, l’origine, la situation sociale, qui peuvent aggraver la situation des femmes et leur évolution dans l’emploi.

A noter que la crise du Coronavirus a accentué certaines inégalités. On note une baisse de la participation des femmes à l’emploi dans tous les secteurs, un déficit de candidates lors des appels à candidature, et globalement une baisse de la séparation vie privée et vie professionnelle dûe au télétravail massif.

Le secteur public doit être exemplaire en matière d’égalité des genres, car les difficultés ne manquent pas : sous-représentation des femmes, inégalités salariales, comportements sexistes au travail, difficultés de concilier vie professionnelle et vie privée, etc. Le texte voté aujourd’hui ne contribuera pas seulement à changer les comportements mais aussi les règles du jeu, via par exemple la mise en place d’une représentation paritaire pour les fonctions de gestion et de direction.

Le travail du Parlement :

Pour rappel, nous avons accueilli au sein de la Commission huit intervenantes, qui ont apporté des contributions très riches au débat, chacun dans son domaine d’expertise : 

  • Mme Isabella Lenarduzzi – Fondatrice et directrice générale chez JUMP
  • Mme Gisèle Dedobbeleer – cadre avec une expérience au sein de différents services publics
  • Mme Fatima Zibouh – Responsable du service anti-discrimination – Actiris Inclusive
  • Mme Cécile van de Leemput – Professeur – ULB
  • Mme Tamara Eelsing – Diversity manager – STIB
  • Mme Anne Rosine Delbart – Professeur – ULB
  • Mme Masanka Tshimanga – présidente communautaire et vice-présidente générale SLFP – Syndicat Libre de la Fonction Publique – Enseignement
  • Mme Gratia Pungu – déléguée CGSP

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