Depuis plusieurs années, il est fait le constat répété que la transition numérique est là et que nous devons en prendre le tournant. Aujourd’hui, il est aussi fait le constat répété que l’enseignement peine à suivre le rythme de la révolution numérique et que trop peu de politiques publiques sont mises en place afin d’apprendre aux élèves à penser dans un monde numérique. La crise du Coronavirus a mis plus que jamais cet enjeu au centre de la table. Que se passe-t-il dans nos écoles ?
Cours en visio-conférence, plateformes de partage de fichiers, logiciels de traitement de texte, tous ces outils constituent des points de contact entre les jeunes et le monde numérique. Raison pour laquelle Ecolo plaide pour un développement du numérique selon des balises. Pour un déploiement numérique libre, transparent, inclusif et éthique. Mettre dans les mains d’étudiants de 6 à 25 ans des outils technologiques va orienter fortement leurs utilisations futures, que ça soit dans leur travail ou dans la sphère privée. Or on le sait, derrière ces outils se cachent des questions politiques : le monopole des GAFAM dans le paysage numérique, les données privées et leur exploitation commerciale, l’utilisation de main d’oeuvre bon marché à l’autre bout du monde pour développer des programmes, etc.
Concrètement, aujourd’hui, l’écrasante majorité des établissements utilisent une solution Microsoft pour ses étudiant.e.s. Si l’on prend l’exemple des logiciels de visioconférence, les établissements ont opté pour le logiciel Teams, au lieu d’un équivalent libre comme Jitsi.
Je vois au moins trois problèmes majeurs dans l’offre Office 365 dont bénéficient les Hautes Écoles et les Universités :
- Premièrement, l’emprise monopolistique qu’ont les logiciels Microsoft pose question. Ce monopole est mondial et notre enseignement y contribue, au détriment d’autres solutions plus locales, éthiques, démocratiques et écologiques qui pourraient vouloir se développer.
- Deuxièmement, le coût que génèrent ces offres. Les licences sont coûteuses, se renouvellent de mois en mois, d’année en année, et le contexte de quasi non-concurrence laisse Microsoft imposer ses prix. On parle ici d’approximativement 2,50€ par personne et par mois, soit ½ millions d’euros pour 200 000 étudiants. Le montant doit nous amener à nous interroger sur ce choix.
- Troisièmement, ces logiciels ont démontré à bien des égards leurs limites en termes de respect de la vie privée.
En Allemagne, une décision ferme a été prise et vise à interdire l’utilisation de Windows 10 et de Office 365 dans les écoles, parce que l’entreprise issue des GAFAM.
L’Europe et les différents Parlements (dont le nôtre) font du monopole des GAFAM une question politique à part entière, et l’enseignement peut être un levier d’action privilégié. Le Gouvernement s’est d’ailleurs positionné sur la question, en utilisant ces mots : “Les standards ouverts, les logiciels libres et l’open data sont des outils indispensables pour assurer l’accessibilité de tous aux technologies de l’information tout en garantissant la liberté de chaque utilisateur et le respect de la vie privée.”.
N’hésitez pas à en lire davantage sur mon travail sur la question.
Le Soir : L’enseignement supérieur pas assez «open source»?
Business AM : La Belgique à la traîne dans la course aux logiciels libres dans l’enseignement