L’Histoire, avec un grand H, est encore majoritairement contée au masculin. Pourtant, les femmes ont également chanté, dessiné, régné, peint, travaillé, dansé, écrit, manifesté, etc. Bref, les femmes ont compté et participé à la fabrication de l’Histoire. L’espace public a, depuis toujours, été un lieu rendant hommage à cette histoire. Les rues, les ponts, les boulevards ou encore les stations de métro portent en général le nom de ceux qui l’ont faite et trop peu les marques de celles qui y ont également contribué ! Gouvernement et Parlement se saisissent de la question.
Découvrir le texte du Parlement sur le sujet.
Cette invisibilisation est chiffrée. En effet, on ne dénombre seulement que 3,6% de rue portant le nom d’une femme contre 26% pour les hommes. A Bruxelles, 29 stations de métros portent des noms masculins contre 4 pour les femmes, ayant des noms de princesses et de saintes. 6,1% des voiries bruxelloises rendent hommage à des femmes. Au-delà de l’espace public, l’invisibilisation des femmes se retrouve dans une pluralité de domaines : la littérature, la politique, la recherche scientifique, la peinture, etc. Les femmes sont donc invisibilisées dans les champs de la production à la pensée, et surtout dans les manuels scolaires et d’histoire.
La représentation des femmes passe, en général, par une pluie de stéréotypes et une hyper sexualisation, que cela soit dans les films, les séries ou la publicité. Ramener leurs noms et leurs histoires dans la ville, à Bruxelles, est, tout d’abord, un moyen de permettre une reconnaissance de leur contribution à l’avancée de l’histoire et une revalorisation de leurs savoirs, et ensuite, de rendre l’espace public plus inclusif. L’enjeu est là, un espace public pour toutes et tous, afin de lutter contre le sentiment d’insécurité et de montrer qu’il appartient autant aux femmes qu’aux hommes. En 2020, à l’occasion de la journée internationale pour la lutte pour les droits des femmes, le collectif « Noms peut-être ! » avait renommé des stations de métros par des noms de femmes : Joséphine Baker, Isala Van Diest, Lucia de Brouckère, Aoua Keïta, Léonie Lafontaine, etc. Il est important d’exposer ces noms, pour montrer que ces destins sont possibles, pour susciter la curiosité, des vocations et/ou un questionnement. Il est également question de leur rendre une juste place dans le monde d’aujourd’hui.
Le Parlement bruxellois s’est récemment saisi de la question, et va bientôt débattre d’un projet de Résolution pour augmenter la visibilité des femmes dans l’espace public.
Grâce à la Ministre Verte Elke Dan Ver Brandt, sept arrêts vont changer de noms et se féminiser de manière permanente :
- L’arrêt Demunter, desservi par les lignes de bus 13 et 88, deviendra l’arrêt Audrey Hepburn, en hommage à la célèbre actrice, ambassadrice de l’Unicef, qui est née à Ixelles.
- L’arrêt Ypres, desservi par le tram 51, sera rebaptisé Marguerite Duras, femme de lettres, dramaturge, scénariste et réalisatrice française.
- L’arrêt Stallaert, desservi par le bus 60, sera renommé Marie Depage, infirmière belge connue.
- L’arrêt Outre-Ponts, desservi par les trams 62 et 93 ainsi que par le bus 57, sera rebaptisé Marie-Christine, du nom de l’archiduchesse de Habsbourg.
- La nouvelle ligne 74 reliera Erasme à Uccle Calevoet. Son terminus à Erasme sera baptisé Clémence Everard, du nom de la première femme diplômée de médecine, chirurgie et obstétrique en Belgique.
- La nouvelle ligne de bus 52 créée dans le cadre du plan bus reliera la Gare centrale à Forest National. Un de ses arrêts, situé rue de la Madeleine dans le centre-ville, sera baptisé Madeleine.
- L’arrêt Parc qui dessert les lignes de bus 63, 65 et 66 sera rebaptisé Rosa Parks du nom de la militante pour les droits civiques dont le refus de céder sa place à un homme blanc dans un bus a conduit à l’abolition des lois ségrégationnistes aux Etats-Unis.
La Ministre s’est également engagée à faire disparaitre la publicité sexiste de nos stations de la STIB, à en améliorer l’aménagement afin qu’elles soient plus inclusives. Et cela, par le biais de « marche exploratoire » ou en mettant à disposition davantage de toilettes publiques dans les espaces de la STIB. De plus, d’ici 2023, 17 arrêts de surface devraient porter des noms de femmes célèbres. Comme nous le rappelle les collectifs : l’Architecture qui dégenre, « Noms peut-être » ou EqualStreetNames.Brussels, ces sept noms de femmes dans la ville sont un pas de plus vers l’égalité pour Bruxelles mais nous sommes encore loin de la parité. Le travail continue !